Mens sana in corpore sano
Nous devons la citation latine « Mens sana in corpore sano » traduite en en français par « un esprit sain dans un corps sain » à l’auteur antique Juvénal. Elle est souvent utilisée pour nous faire comprendre que nous ne sommes pas de purs esprits, certainement pas de nature angélique et que nous devons prendre soin de notre corps pour parvenir à un bon équilibre intérieur.
Vous souvenez-vous du jeu télévisé « la tête et les jambes » que nous regardions enfants ? Chaque équipe disposait d’un « cerveau » qui répondait à des questions toutes plus ardues les unes que les autres (la tête) ; et d’un sportif de haut niveau (les jambes) qui n’intervenait qu’en dernier recours pour repêcher son équipier si son score était insuffisant pour poursuivre l’aventure. Chacun des co-équipiers avait son domaine d’excellence.
Pour trouver la paix intérieure, l’être humain a besoin de mettre en équilibre plusieurs composantes de sa vie personnelle et sociale. Le pentagramme de Ginger représenté par une étoile à cinq branches schématise un homme avec en haut la tête, les bras sur le plan horizontal et les jambes en bas. Bien souvent pour poser nos choix petits ou grands, nous nous laissons conduire et/ou influencer par notre tête (pôle rationnel), par le cœur (pôle affectif) sans oublier par les autres (pôle social). Et nous n’accordons pas toujours de l’importance à notre corps (pôle physique) ni au monde (pôle spirituel, métaphysique). Nous les mettons en sourdine entraînés que nous sommes par la routine, contaminés par la mode ambiante, la pression idéologique dominante.
Comme je le répétais souvent à mes patients dépendants, se libérer d’une addiction, c’est rompre un équilibre précaire, obtenu jusque-là grâce à la substance et/ou au comportement addictifs, pour trouver un nouvel équilibre stable cette fois-ci. Or qui dit équilibre sous-entend qu’il y a plusieurs composantes à mettre en équilibre et à bien doser pour parvenir à cet état de paix intérieure tant désiré. Si je ne suis que dans ma tête et que je rationalise tout, je peux passer à côté de la relation vraie affective aux autres. Si je ne me laisse conduire que par le gouvernail de mes émotions, mon impulsivité peut desservir à ma vie relationnelle. Si je surinvestis ma vie sociale et professionnelle, je risque de rater le rendez-vous de ma vie affective et familiale. Si j’oublie que j’ai un corps dont je dois prendre soin cela peut déboucher sur des affections que j’aurais pu éviter et cela me dispense de trouver du bien-être dans une activité physique ou sportive. Si je n’ai aucun sens à ma vie, aucune ligne directrice, nul idéal, nulle spiritualité, je suis un peu comme un électron libre perdu dans l’univers, sans but.
Les deux derniers pôles physique et spirituel, les jambes de l’étoile, nous enracinent dans le monde et nous permettent avec les bras et la tête de concrétiser nos projets. Quand notre corps nous fait défaut, cela devient plus dur de réaliser nos rêves, nos ambitions. Si nous manquons d’une ligne directrice, d’une boussole qui indique constamment le Nord, toujours le même Nord, pas un Nord qui change au petit bonheur la chance, alors nous manquons de profondeur, de spiritualité et sommes comme des girouettes qui tournent au gré du vent.
Il y a mille façons d’être présent à son corps pour se détendre. Déjà, commencer par lui donner si on le peut ce dont il a besoin chaque jour en mangeant, buvant, dormant suffisamment mais sans excès. Il convient aussi d’avoir des temps de repos, de ressourcement autres que le temps du sommeil. Quand on dort, notre corps est relâché mais notre conscience est absente ; par conséquent, on n’a pas la conscience d’un bien-être physique. C’est seulement au réveil qu’on pourra dire, je suis reposé, j’ai bien ou mal dormi.
Dans la journée, on peut accorder à son corps des temps de relâchement plus ou moins longs. Quand je chante, quand je joue d’un instrument de musique, je suis là, ici et maintenant présent à mon corps, ma tête et mon cœur ; mon corps par le son qu’il produit venant de mes cordes vocale ou de mon instrument de musique véhicule mes pensées et mes émotions. Je vis alors de purs moments d’apaisement où tout est en harmonie, synchronisé. Quand je cours, pédale, nage, joue au foot, au rugby… la tension musculaire de mon corps, la stimulation de la dopamine sur mon cerveau, la volonté de me dépasser, de battre mon record personnel, tout cela contribue à créer me procurer de la détente, un sentiment de satisfaction. Quand nous jouons aux billes, à la pétanque, à des sports ou à des jeux qui sollicitent notre corps et font intervenir d’autres partenaires, il s’y ajoute en plus un défi à relever, le challenge d’une victoire à remporter en équipe. Quand je m’attelle à une activité manuelle artistique (sculpture, peinture, dessin, poterie, vannerie, etc.), je suis tendu avec tout mon être sur la réalisation d’une œuvre, mon bébé, et cela me détend, me procure de la fierté, de la satisfaction. Mon corps est en paix.
Cela dit, le corps cultivé pour lui-même nous conduit à une impasse car fatalement nous vieillirons et perdrons notre souplesse, notre endurance, notre robustesse, notre réactivité, notre niveau de performance et nous devrons tôt ou tard revoir notre équilibre de vie, notre manière de nous positionner dans la vie. Si notre corps n’est qu’un outil de travail ou de service aux autres que nous malmenons sans jamais lui donner repos et ressourcement, nous courons à l’épuisement physique ou moral.
Lors d’une retraite chez les carmes de Rions, un moine m’avait attiré l’attention sur le point suivant : « Frère corps a besoin de repos. » Non, nous ne sommes pas de purs esprits, les moines et moniales ont eux aussi des temps de récréation, de détente et bien entendu de sommeil.
Seigneur, apprends-nous à recevoir notre corps de Toi. Apprends-nous à l’accepter, l’aimer, le soigner sans narcissisme, à le respecter comme temple de Ton Esprit. Aide-nous à prendre soin et à respecter le corps de nos frères et sœurs. Donne-nous de poser sur nous et sur nos frères et sœurs, le même regard d’amour que Tu as pour chacun de nous.




